Praia do Guincho – Estoril

La partie portugaise de On Her Majesty’s Secret Service possède un charme singulier, intimement lié à la région elle-même — et l’on s’en rend pleinement compte lorsque l’on voyage sur place.
Le film s’ouvre sur un inconnu roulant à l’aube sur une route côtière. Cette introduction tranche nettement avec celles de Connery au casino, ou de Dalton, Brosnan et Craig, souvent plongés d’emblée dans l’action. Bond, si l’on en croit le récit, est alors à la recherche de Blofeld.

À l’écran s’enchaînent la séquence désormais mythique de la plage, puis celle de l’hôtel de James Bond. L’ensemble, baigné d’un charme particulier, a été tourné dans la région du Grand Lisbonne, autour d’Estoril et de Cascais, sur la côte Atlantique.
Rappelons d’ailleurs que c’est à Estoril que la production avait installé son camp de base.

Après une superbe journée au Palais national de Sintra — où se garer s’est avéré un véritable cauchemar, malgré la beauté du lieu — nous avons entamé notre retour par la route côtière EN247… la même que celle empruntée par Bond dans les toutes premières images du pré-générique.
Même si le tracé n’a pas fondamentalement changé depuis 1969, la végétation très dense a aujourd’hui transformé la lecture du paysage.
Mais, avec un bon œil (et quelques arrêts parfois un peu périlleux sur le bas-côté), toutes les localisations restent parfaitement identifiables.

On y retrouve notamment la fameuse borne 247-91, visible à l’écran au moment où Bond découvre la plage.
Ou encore le moulin — désormais transformé en antenne relais — que l’on distingue en arrière-plan juste avant que la scène ne bascule vers l’action.

C’est le cameraman Alec Mills qui filme la séquence à l’arrière de l’Aston Martin DBS avec une caméra Arriflex portative. Lors de la descente vers la plage, il dut éviter de coller son œil au viseur, de peur de se blesser lors des secousses.

La portion utilisée pour le tournage n’excède pas deux kilomètres et se parcourt très rapidement. Ce lieu a été identifié par mon ami Thomas Gleitsmann, que j’ai réellement découvert à l’occasion de la préparation de ce voyage.

Cinq minutes après avoir dépassé ce moulin, toujours sur la EN247, nous arrivons à la mythique Praia do Guincho… exactement comme James Bond.

Située à seulement 6 km de Cascais, la Praia do Guincho est une vaste étendue sauvage et spectaculaire. Le jour de notre passage, les rafales de vent étaient d’une rare intensité et l’Atlantique particulièrement agité — une atmosphère brute qui correspond parfaitement à la mythique ouverture d’On Her Majesty’s Secret Service, lorsque Bond sauve Tracy avant d’affronter les hommes de Draco.

Peter Hunt eut d’ailleurs beaucoup de mal à trouver une plage capable d’offrir un décor aussi dramatique : la plupart des sites qu’il visita présentaient des vagues trop modestes et une mer trop calme. Mais pas à Guincho, tout près de la Boca do Inferno (“La Bouche de l’Enfer”), célèbre pour ses vagues puissantes son vent violent. Le lieu correspondait parfaitement à l’impact visuel qu’il recherchait. Depuis, la zone est même devenue l’une des mecques du kitesurf !

Les 13 et 14 mai, l’équipe tourna l’ensemble de la séquence, en partie en nuit américaine pour renforcer les contrastes. Lors des repérages, George Leech remarqua sur la plage plusieurs éléments — bateaux, rames, filets — qui servirent d’accessoires improvisés au combat. Le sauvetage de Tracy fut l’une des prises les plus délicates : Lazenby se souvenait que Diana Rigg, alourdie par sa robe détrempée, n’était pas simple à porter dans les vagues glaciales. L’anecdote raconte que Lazenby et Terence Mountain hésitaient à replonger dans l’eau froide, jusqu’à ce que Hunt les motive… à coups de brandy portugais.

Avec plus de quarante angles de caméra et un montage épique, Hunt mit véritablement tout en œuvre pour créer une scène d’action spectaculaire destinée à asseoir la crédibilité du nouveau 007. Sur place, les angles choisis par Peter Hunt sont faciles à retrouver. On repère aisément la zone du combat, même si la lumière de fin d’après-midi ne m’a pas permis de capturer le cadrage exact vers la mer.

La Praia do Guincho reste un incontournable pour tout passionné souhaitant marcher dans les pas de Bond.
Mon conseil : empruntez la même route côtière que 007 pour vous y rendre, et évitez la haute saison. Vous profiterez mieux du lieu… et prendrez les plus beaux clichés.

Sur le chemin du retour vers Setubal, nous avons fait une halte à Cascais, voisine de la très chic Estoril. Cette charmante cité balnéaire mêle élégance rétro et urbanisme authentique.

Le court plan où Bond démarre son Aston Martin DBS dans les premier instants du film a été tourné sur la Parada da Artilharia Anti Aérea, une petite rue à l’arrière des remparts de la citadelle historique de Cascais.

Le jour de notre passage, un chantier d’entretien gâchait un peu la magie du lieu, et la photo n’est pas la plus réussie. Mais les palmiers et ces façades immédiatement reconnaissable suffisent à nous replonger dans l’ambiance de l’ouverture de film.

Nous n’avons pas eu l’occasion d’y retourner au lever du soleil… mais je suis certain que l’ambiance y serait encore plus bondienne.

Depuis notre visite la place a été complètement modernisée, il n’y a plus de route de parking, ni de palmier …. On peut presque dire que le lieu a disparu …

Fin avril 1969, le casting et l’équipe de tournage quittent la Suisse pour le Portugal, et plus précisément pour Estoril, où ils s’installent au Palácio Hotel. Ce lieu servira à la fois de lieu de tournage, de salle de conférence de presse et d’hébergement.

Après une matinée passée dans le bas de Lisbonne, avec la visite de la Tour de Belém et du Monastère des Hiéronymites, nous nous rendons à Estoril pour découvrir l’hôtel de Bond et Tracy. Ce lieu occupe une place particulière dans l’univers des hôtels Bond : tout en restant un hôtel de luxe, il a su préserver et entretenir la mémoire du film. Il possède également une histoire liée à James Bond bien antérieure au tournage d’On Her Majesty’s Secret Service.

Durant la Seconde Guerre mondiale, le Palácio servait de repère pour les espions. En 1942, Ian Fleming y séjourna, visita le casino d’Estoril, perdit face à des joueurs portugais (plus tard décrits comme des espions allemands) et s’inspira de cet épisode pour écrire son premier roman, Casino Royale, dix ans plus tard.

Une fois sur place, on est immédiatement charmé par la dimension humaine du lieu. Le stationnement à proximité est facile, et il est simple de photographier l’extérieur, où seul le voisinage a changé. À l’intérieur, le lobby évoque rapidement les décors du film.

Le concierge José, qui apparaît brièvement dans le film en donnant la clé de la chambre de Bond au directeur de l’hôtel, travaillait toujours au Palácio lors de notre visite (malheureusement absent le jour de notre passage). Très fier de sa participation, il échange encore avec les fans et se prête volontiers aux photos à l’intérieur de l’hôtel. Dans quel autre établissement bondien peut-on vivre cela ? Pour prendre des photos, il suffit de demander et préciser que c’est pour James Bond : on m’a simplement demandé de ne pas photographier les clients… rien de plus normal.

Le 30 avril 1969, après avoir obtenu toutes les autorisations nécessaires, la production organisa une répétition publique des scènes de mariage de Bond et Tracy pour générer de la publicité. La robe de mariée de Tracy, conçue par Marjory Cornelius, y fut dévoilée pour la première fois. Plusieurs scènes furent mises en scène, notamment la découpe du gâteau de mariage à trois étages et la pluie de pétales sur Lazenby et Rigg lors de leur course vers la voiture.

Les images diffusées dans la presse donnaient l’impression d’un tournage, mais les caméras étaient en réalité déconnectées. Il s’agissait d’un gros coup de com, qui fonctionna à merveille, notamment outre-Manche.

Les scènes intérieures de chambres furent tournées aux studios Pinewood, mais certains éléments architecturaux de l’hôtel inspirèrent les décors, notamment le couloir du 5ᵉ étage, que je n’ai malheureusement pas pu voir.

Certains visiteurs chanceux peuvent même photographier la piscine depuis les balcons privés, grâce à la gentillesse des propriétaires. L’Estoril Casino, voisin de l’hôtel, se reflète dans la piscine avant la transition vers un décor en studio.

Sources

• The Making Of the the On Her Majesty’s Secret Service – Charles Helfenstein

• Googlemaps

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Julien Abauzit (JaBoz)